Tu bosses dessus depuis des jours, déjà. C'est probablement, d'ailleurs, ce qui te prends le plus de temps en ce moment, parce qu'il est hors de question que tu te plantes sur une potion, toi. Déjà parce que tu as bien trop de fierté pour ça, ensuite parce que, tout de même, tu restes malgré tout, en quelque sorte, le digne héritier de celui qui t'avais tout appris dans ce domaine. Toi qui enfant, avait toujours été particulièrement brouillon, toi qui manquait clairement d'application, Severus Rogue avait su t'inculquer la rigueur, la précision et la justesse, tant de qualités qui étaient parmi les plus importantes lorsque l'on désirait être bon dans l'art des potions.

Tu savais, qu'on ne pouvait décemment pas se lancer sans un minimum de préparation dans des expériences. Il ne s'agissait pas de cuisine, mélanger deux ingrédients qui n'allaient pas ensemble était une erreur susceptible de coûter la vie, ou au moins une partie de son corps au pauvre malheureux qui aurait pu avoir cette idée. De ton côté, c'est vers le Philtre de Paix que ton choix s'était orienté, cette potion, tu l'avais faite et refaite afin de t'entraîner pour ton examen, tu estimais en connaître parfaitement la composition, et surtout, savoir la préparer avec assez de justesse pour ne pas provoquer d'effet secondaire. Malheureusement, ce n'était pas le cas de toute le monde et cette potion était la seule capable de produire de véritables résultats sur le stress et l'anxiété. Ton but était donc de trouver une alternative à l'essence d’hellébore qui certes était efficace, mais pouvait s'avérer particulièrement dangereuse en cas de surdosage du fait de son caractère vénéneux particulièrement puissant. Dans un premier temps, tu t'étais donc plongé dans les livres de botanise pour y dégotter une plante susceptible d'imiter les effets de l'hellébore, mais sans succès. C'est donc de nouveau vers les poisons que tu t'étais orienté et si, dans un premier temps des plantes telles que l'aconit, par exemple, t'avais semblé être des compromis acceptables mais aucune n'avait passé le cap de tes études sur les associations en potion. A chaque fois, tes mélanges promettaient d'être bien trop instables pour que tu te risques à essayer.

Après des heures, et encore d'autres heures, tu t'étais finalement arrêté sur la Rhodiole. Cette plante présentait toutes les caractéristiques que tu désirais, son dosage importait peu, du moins, une dose trop importante ne pouvait pas être dangereuse et si ça fonctionnait comme tu l'espérais, cela pouvait même rendre la potion tout aussi efficace, voir même davantage dans certains cas précis. Par conséquent, fier de ta trouvaille, tu n'avais pas pu attendre pour tenter l'expérience, tu savais que tu en aurais pour plusieurs heures, mais tu voulais être fixé afin de pouvoir te lancer dans de nouvelles recherches en cas d'échec. C'est pour cette raison que tu t'étais rendu jusqu'à une salle de potions, choisie au hasard. Cependant, tu n'avais pas pensé une seconde qu'elle puisse être occupée et lorsque tu entres, te voilà nez à nez avec la jeune Prince, visiblement contrariée – tu peux le lire dans ses traits – et un chaudron bouillonnant étrangement devant elle. « Malheureusement, ton nez n'est écrit nul part, et tu n'es pas seule dans ce cursus. » Oh, tu aurais pu simplement faire demi-tour, il y avait une salle de potion différente à l'autre bout du couloir mais, tu ne serais pas toi si tu choisissais toujours les solutions de facilité alors … tu préfères insister, et surtout, l'occasion est trop belle de mettre quelques bâtons dans les roues d'une étudiante qui, tu le savais, avait toutes les capacités requises pour te faire de l'ombre en Potions. « Ça sent le brûlé. » Et tu te retiens aussi de lui dire qu'elle ne ressemble plus à rien et que son élégance habituelle est probablement ce qui a brûler dans son chaudron. « Alors, Prince, on galère ? »

Et tu cherches. Et tu provoques. A croire que la jouer comme ça, c'est le seul moyen que tu as de communiquer avec tes semblables, Drago. Parce que, encore une fois, tu pourrais largement être sympathique, tu en as la capacité, tu l'as découvert, ces derniers mois. Tu n'es pas dépourvu de bons sentiments, c'est juste que ça te demande plus d'efforts, sans doute, qu'il est plus naturel pour toi d’être exécrable et insupportable. D'ailleurs, tu pousses le vice jusqu'à tirer une chaise, pile en face de son chaudron malodorant, et tu viens t'y installer, en lançant d'étranges regard de biais à ce qui est en train de bouillir là-dedans. Durant un instant, tu en viens à te demander si tu ne prends pas un gros risque en restant là … Cette chose pourrait bien exploser d'une minute à l'autre. « Je sais. » Autrement dit, tu balayes simplement ses remarques de ces quelques mots, accompagnant même ta réponse d'un roulement d'yeux qui, probablement, te rends encore plus agaçant.

Tu restes là, un instant, quelques minutes en réalité à la regarder, à observer sa potion. Tu sais à quel point ta présence doit être dérangeante, mais ce n'est pas pour autant que tu prendras la décision de sortir, et de la laisser travailler en paix. Tu pourrais aussi aller t'installer à l'autre bout de la pièce, pour travailler sur ton propre projet, mais le fait est que de voir Caelina Prince en galère avec une potion est plutôt intéressant. Du coup, lorsque tu te lèves, c'est pour te mettre à tourner autour de sa paillasse, les bras croisés, pour observer ses ingrédients et son chaudron. Tu crois comprendre ce qu'elle essaie de faire, cependant, voilà que le chaudron se met à bouillonner un peu plus violemment, au point même de déborder complètement. La jeune femme recule alors vivement, elle te pousse par la même occasion, t'évitant ainsi une brûlure douloureuse. « Détrompe toi, je déplore toujours une potion ratée et les ingrédients gaspillés. » Bien entendu, c'était inévitable lorsque l'on apprenait, encore plus lorsqu'il fallait, comme dans votre cas, faire des expériences sur des potions si avancées dans l'espoir d'obtenir de vrais résultats. « Et puis où serait le plaisir … si tu t'avouais vaincue si facilement, hein, Prince ? » Tu passes derrière elle, juste derrière elle, tel un serpent qui se glisse derrière sa proie, tu t'arrêtes un instant, quelques secondes durant lesquelles tu te penches sur sa nuque, pour murmurer quelques mots. « Je préfère t'arracher cette victoire plutôt que de te voir me l'offrir. »

Tu finis par soupirer, pour finalement t'approcher d'une paillasse voisine sur laquelle tu t’appuie en croisant les bras. « Ça va Prince, détends toi. Il te reste plus d'un mois pour arriver à quelque chose. Respire. » Tu détournes alors le regard, avant de te détourner complètement et de sortir à ton tour un chaudron que tu viens poser sur le plan de travail.